Réussir une rétrospective agile
Pour le lancement du meetup Apéros Agiles à Nancy, je présentais les fondamentaux de la rétrospective agile.
La rétrospective dans le contexte d'un projet Scrum
Bien que l'outil "Rétrospective" ne soit pas réservé à Scrum, c'est bien dans ce contexte qu'il s'est démocratisé.
Alors que la démo est un exercice d'amélioration continue du produit que l'on est en train de réaliser, la rétrospective permet l'amélioration continue du processus de travail en commun.
En conséquence, les discussions sur le produit auront plutôt lieu lors de la démo, ou encore durant le sprint planning.
Avec la rétrospective, on se concentre sur ce qui a bien fonctionné et sur ce qui nécessiterait d'être amélioré au sein de l'équipe, dans la relation entre les membres de l'équipe et le product owner, dans la relation entre l'équipe du projet et le reste de l'organisation.
Un déroulé standard
Dans leur livre intitulé "Agile Retrospectives - Making Good Teams Great", Esther Derby et Diana Larsen proposent un déroulé standard d'une rétrospective.
Ce déroulé comporte cinq étapes :
- Ouvrir la rétrospective
- Rassembler des informations
- Générer des solutions
- Décider quoi faire
- Fermer la rétrospective
Personnellement, je m'efforce de respecter cet agenda dans les rétrospectives que j'anime. Il a en effet l'avantage de "guider" les participants vers des contributions riches et constructives.
Je sais bien que cet agenda a l'air rigide quand on le lit comme ça, mais pour chacune des étapes il y a un nombre quasi infini de possibilités.
Découvrons les cinq étapes en détail.
Ouvrir la rétrospective
Durant cette première phase, le facilitateur (le scrummaster dans le cadre d'un projet scrum) annonce l'agenda, la période du projet sur laquelle porte la rétrospective, et s'efforce que chacun autour de la table prenne la parole.
Ce tour de table, je le fais de la manière suivante : je demande à tous les participants présents de me donner un mot, un mot qui, selon eux, est représentatif de la période observée (le sprint dans un contexte scrum). Les contributions peuvent déborder du cadre du mot seul, mais surtout, cela ne doit en aucun cas devenir un discours, ou partir en discussion. Les grandes discussions auront leur place plus tard dans la rétrospective.
Si l'un des participants ne prend pas la parole dans cette phase, inutile d'aller plus loin : il faut comprendre pourquoi il ne prend pas la parole, et résoudre ce blocage avant tout.
Rassembler des informations
C'est le moment où, quel que soit le format (ou presque), il est demandé aux participants de remonter des faits ou des ressentis relatifs à la période scrutée. Ici encore, point de discussion, mais ne vous inquiétez pas, ça arrive !
C'est peut-être dans cette phase de la rétrospective que l'on peut trouver le plus de variantes.
En voici quelques unes, mais Internet regorge d'autres exemples :
- Les plus et les moins
- "Mad Sad Glad"
- "Keep-Drop-Start"
- "Starfish retrospective"
- Timeline
- "Speedboat"
- "Dixit retrospective"
- ...
Perso, j'ai une grosse préférence pour la rétrospective Starfish, que je trouve plus nuancée que d'autres formats plus binaires.
Générer des solutions
Enfin, on va pouvoir discuter ! Mais cette discussion, on le voit, est orientée solutions.
Le facilitateur aura comme tâche de prendre des notes au tableau de toutes les idées de solutions exposées par les participants.
Cette phase de la rétrospective s'apparente vraiment à un brainstorming "ouvert", en ce sens qu'il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises solutions, le caractère réaliste de ce qui est proposé sera discuté dans la phase suivante.
Décider quoi faire
Dans cette phase, on "referme" le brainstorming, c'est à dire que les participants doivent constituer un plan d'action.
Ce plan d'action est bien entendu alimenté par les solutions listées plus tôt. Celles-ci sont potentiellement remaniées pour les rendre plausibles et réalisables, mais elles ont vu le jour lors du processus créatif proposé par le déroulé de pensée que l'on suit en s'astreignant aux étapes décrites par les auteurs.
Idéalement, le plan d'action ne doit contenir que 3-4 points pour que celui-ci puisse être mis en oeuvre durant le prochain sprint. Il peut être nécessaire de faire entrer certaines de ces tâches dans le suivi de Sprint pour faciliter leur prise en compte.
Fermer la rétrospective
Même les rétrospectives peuvent être améliorées. On leur applique donc les mêmes outils d'amélioration continue.
Personnellement, j'utilise le R.O.T.I. (ou Return On Time Invested) pour collecter les feedbacks des participants.
A main levée, chacun donne une note de 1 à 5 (1 = j'ai perdu mon temps, 3 = le résultat est à la hauteur de mon investissement temps, 5 = le résultat est bien supérieur à mon investissement temps), note que l'on discute ensuite en demandant notamment ce qu'il aurait dû se passer pour que la personne donne une note supérieure.
Avec ce dernier exercice, on "rattrape" potentiellement les dernières frustrations, les sujets non traités qui tiennent à coeur à l'un ou à l'autre. La parole est ainsi libérée, et chacun aura eu le temps nécessaire pour s'exprimer et être entendu par l'ensemble de l'équipe.
Conclusion
Après cet exposé, les participants ont pu poser des questions relatives à leurs propres pratiques de la rétrospective et exposer les problématiques qu'ils rencontrent dans leur contexte.
Nous avons ensuite fait une rétrospective de ce premier Apéro Agile et fixé un plan d'action pour les prochains événements (changement de lieu, suggestions de thèmes à aborder).
La rétrospective est l'outil par excellence de l'amélioration continue. C'est un investissement conséquent (selon la taille du groupe, une rétrospective efficace peut durer 1 à 2 heures), mais c'est un investissement pour l'avenir : d'une part, l'amélioration du système permet de créer des processus soutenables et durables, et d'autre part le cercle de parole permet de désamorcer les conflits potentiels et de réduire les tensions entre les personnes.